La capitale iranienne a accueilli ce festival international du film, avec de plus en plus de productions et de cinéastes étrangers, dont Oliver Stone, le célèbre réalisateur américain.
Un vent nouveau souffle-t-il sur le cinéma en Iran ?
Eurosnews|Wolfgang Spindler|02/05/2018
Le Festival du Film de Téhéran dont l’édition 2018 vient de s’achever s’ouvre de plus en plus aux long-métrages et cinéastes étrangers. Si pour être projetées en Iran, les œuvres doivent se soumettre au filtre de la censure, les autorités n’interfèrent quasiment pas dans cet événement d’après ses organisateurs.
Cela signifie-t-il que la parole des réalisateurs iraniens peut désormais se libérer comme pour le Cambodgien Rhity Panh dans ses films sur le génocide perpétré par les Khmers rouges ? “Le travail sur la mémoire est nécessaire,” estime le réalisateur. “Personnellement, je suis occupé avec le Cambodge : ce qui est déjà grand et vaste comme territoire de mémoire à explorer et je laisse aux Iraniens le soin de réfléchir à leur propre histoire,” dit-il.
Parmi les personnalités présentes lors de cette édition, Oliver Stone. Le cinéaste américain a évoqué le sort de réalisateurs iraniens comme Jafar Panahi qui est invité à Cannes, mais qui n’a pas le droit de voyager.
“Les autorités en Iran font face à des difficultés, elles assument ce qu’elles font, elles sont très réalistes,” estime Oliver Stone au micro d’euronews. “Je connais la situation d’un réalisateur en particulier : il est invité à Cannes ; peut-être qu’on ne le laissera pas y aller, mais au moins, il a pu faire son film, c’est le plus important,” assure-t-il avant de lancer : “C’est d’ailleurs peut-être mieux pour lui de ne pas avoir le droit de voyager : comme cela, on parle plus de lui ?”
Cette année, le festival a choisi de rendre hommage à un travail interdit par l’Iran à ses cinéastes : celui qui consiste à explorer le passé d’un pays sans tabou. C’est ainsi que le Cambodgien Rithy Panh a reçu un Prix pour l’ensemble de sa carrière des mains d’Oliver Stone.
Palmarès international
L’Iranienne Mahoor Alvan a été désignée meilleure actrice pour son rôle de femme plus âgée dans le film “Hattrick” de l’Iranien Ramtin Lavafipour sur la manière dont on perçoit les changements chez ceux qui nous entourent.
“On a fait plusieurs répétitions avec le réalisateur pour lire le script et en parler ensemble : on a évoqué tous les détails, le passé et l’avenir de mon personnage,” raconte Mahoor Alvan. “Je crois que tout ce qui m’a été dit m’a énormément aidée à prendre la dimension du rôle,” affirme-t-elle.
La réalisatrice slovène Hanna Slack a récupéré le prix du “meilleur acteur” au nom du comédien qui joue le rôle titre de son film “Le Mineur” : le Croate Leon Lučev.
Son personnage découvre dans une mine abandonnée, des milliers de cadavres de personnes exécutées pendant la Seconde Guerre mondiale. Son patron fait pression sur lui pour qu’il n’en parle à personne.
“Ága” désigné meilleur film
Quant au Prix du meilleur film, il a été attribué au réalisateur Milko Lazarov et à la productrice Veselka Kiryakova pour “Ága”, le portrait d’un couple de nomades qui perpétue les traditions de son peuple dans le nord-est de la Sibérie. Une histoire mélancolique malgré la rudesse de cette réalité glacée.
“Depuis mon enfance, j’adore ce genre d’histoires qui se passe dans les contrées du nord, d’où ce choix probablement,” concède le cinéaste Milko Lazarov avant d’ajouter : “J’adore tourner ce type de films silencieux et lents et l’endroit idéal pour les tourner, c’est la Sibérie.”
“Ce festival a tous les ingrédients qu’il faut pour faire un bon festival international du film : un programme très riche, de nombreux invités étrangers, un marché du film, de nombreux ateliers,” énumère notre reporter Wolfgang Spindler sur place. “Qu’Oliver Stone puisse assister au festival, cela aurait été impossible il y a dix ans : un vent nouveau souffle sur Téhéran,” conclut-il.