Alors que l’Iran lui a accordé deux mois pour obtenir une dérogation pour contourner les sanctions américaines, le PDG de Total, Patrick Pouyanné, n’y croit plus. «Il faut voir la réalité en face», explique-t-il dans un entretien à Ouest-France.
Iran: Total a perdu l’espoir de rester
Le figaro.fr Publié le 01/06/2018 à 10:18
Total semble résigné quant à ses chances de se maintenir en Iran. L’entreprise française semble en effet ne plus se faire d’illusions sur son avenir dans le pays, en particulier concernant sa participation dans le projet d’exploitation gazier, South Pars 11 (SP11). Alors que le retour des sanctions américaines menaçait déjà grandement les activités de Total, le délai de deux mois pour obtenir une dérogation de la part des États-Unis, annoncé jeudi par l’Iran, a été le coup de grâce. «Vous avez entendu leurs déclarations? Vous croyez qu’ils vont en donner une [dérogation]? La stratégie américaine, c’est le maximum de sanctions pour étouffer l’Iran. Pourquoi ils feraient preuve de faiblesse? Nous avons demandé au gouvernement français de soutenir notre demande de dérogation, mais il faut voir la réalité en face», a déclaré le patron de Total, Patrick Pouyanné, dans un entretien accordé ce vendredi à Ouest-France, alors que la prochaine assemblée générale du groupe a lieu ce vendredi à Paris.
L’annonce de l’Iran contraint en effet Total à trouver une solution au plus vite afin d’obtenir une exemption des sanctions américaines qui seront imposées dès le 4 novembre aux entreprises par Donald Trump à la suite de sa décision de se retirer de l’accord sur le nucléaire iranien. Dans le cas contraire, Total devrait céder ses parts (50,1%) dans le contrat de développement du champ gazier South Pars 11 à son partenaire chinois jusqu’alors minoritaire (30%), la société CNPC, selon les termes de l’accord signé en juillet 2017.
«C’est sans regret»
Total avait déjà prévenu que faute d’arrangement avec les Américains, il serait contraint de renoncer à ses projets en Iran. Le groupe craignait les conséquences que cela aurait sur ses activités outre-Atlantique. Les banques américaines sont impliquées dans près de 90% des opérations de financement de ses activités et plus de 30% de son actionnariat est composé d’investisseurs américains. «Les actifs américains représentent plus de 10 milliards de dollars des capitaux employés de Total», avait également rappelé le groupe.
Le pétrolier français espérait pouvoir obtenir un traitement particulier, notamment grâce à l’appui des autorités françaises et européennes. La fermeté américaine semble avoir douché les espoirs du patron de Total: «C’est définitif, tant que la politique américaine sera celle-là», déplore Patrick Pouyanné. Ce dernier ne regrette toutefois pas de s’être lancé sur le juteux marché iranien et se laisse une chance de revenir si les conditions le permettent: «C’est sans regret: on a essayé de saisir une opportunité et je le referai si l’occasion s’en présentait (…) Si on peut revenir un jour, on reviendra», a-t-il fait savoir au quotidien régional.
Bientôt un baril à 100 dollars?
Alors que le cours du pétrole ne fait que grimper depuis quelques semaines, le baril de Brent dépassant pour la première fois depuis 2014 le seuil des 80 dollars, le 17 mai dernier, sa progression pourrait se poursuivre, comme le suggère Patrick Pouyanné. «J’ai dit que ce n’est pas impossible qu’il atteigne les 100 dollars, mais qu’il pouvait aussi baisser. Ce qui était faux c’était d’imaginer qu’il y avait des plafonds et des planchers. Mais il y a beaucoup de tensions en ce moment», a confié le PDG de Total, avant d’ajouter que «le premier sujet de l’Iran, d’ailleurs, ce n’est pas le projet gazier, mais leur pétrole». Ce vendredi matin, le baril de Brent valait 77,47 dollars, en léger recul.